jeudi 24 octobre 2019


Quantité, comportement et devenir d'une contamination

Nous voilà réunis pour ce premier volet consacré à l'écotoxicologie. Aujourd'hui, on évalue l'importance d'une contamination dans l'environnement, sa répartition et son évolution dans le temps.
Tout le monde est là ? On peut commencer ? Alors c'est parti.

D'abord, c'est quoi, l'écotoxicologie ?
L'écotoxicologie (écotox pour les intimes) c'est une discipline scientifique qui étudie l'action et le comportement des agents polluants dans l'environnement. Il existe plusieurs sortes de pollution (chimique, sonore, lumineuse...) mais je ne parlerai que de la contamination chimique de l'eau et du sol.

Les contaminations sont toujours d'origine humaine ?
Non, même si on est plutôt doués pour saccager les milieux naturels, la pollution ne vient pas obligatoirement des activités humaines.
Par exemple, les volcans rejettent d'énormes quantités de métaux (cuivre, zinc, fer, plomb..) et de gaz en tous genres autour d'eux pendant les éruptions volcaniques. La lave refroidie reste très riche en métaux et en minéraux.
Éruption du Piton de la Fournaise, à la Réunion.

 Comment savoir à quel point un milieu est contaminé ?
Le plus simple c'est de mesurer la concentration de la substance recherchée à l'endroit où elle est relâchée dans la nature, à la sortie d'une station d'épuration par exemple, et de la comparer à une valeur limite.
Cette valeur limite est définie par un organisme public (l'AFNOR par exemple) d'après les travaux d'autres organismes (INRA...).
De l'eau rejetée dans une rivière après avoir été purifiée dans une station d'épuration.
Et si on n'a pas de point de départ de cette pollution, on fait comment ?
Si on n'a pas de point de départ, alors la science entre en jeu !
Pour évaluer la contamination, on effectue des prélèvements de sol et d'eau qui seront analysés en laboratoire pour savoir dans quel compartiment le polluant s'est fixé, et dans quelles proportions.
On dose aussi les contaminants dans des organismes modèles, mais comme c'est plus complexe je donnerai plus de détails dans un autre article.

Un compartiment ? Pourquoi on parle de meubles, d'un seul coup ?
Ici, un compartiment désigne un milieu comme le sol, l'air ou l'eau dans lequel vivent les organismes et où la contamination peut se propager.
Et effectivement, dans un autre contexte, ça désigne une partie d'un meuble, un tiroir par exemple.
Une commode pleine de compartiments : les tiroirs. Mais rien de scientifique ici.
 Comment on sait dans quel compartiment le polluant va se fixer ?
En fait, un polluant ne se fixe jamais à 100 % dans un compartiment, c'est plutôt une tendance.
On peut prévoir cette tendance en comparant la molécule recherchée à d'autres molécules proches, qui auront en général des propriétés similaires.
Mais dans le cas des plastiques ou des nanoparticules par exemple, il n'y a pas toujours de référence pour prévoir ces propriétés, alors on dose la molécule recherchée dans les différents compartiments.
En général, une molécule hydrophobe se fixe plutôt dans le sol alors qu'une molécule hydrophile reste surtout dans l'eau.

Comment sait-on qu'une molécule est hydrophile ou hydrophobe ?
Une molécule est hydrophile si elle peut se dissoudre dans l'eau. Si ce n'est pas le cas, on dit qu'elle est hydrophobe.
 Attention, ça devient un peu technique ici.
Pour savoir si une molécule est hydrophile ou non, il faut la regarder en détail:

- Si elle contient principalement des atomes de carbone et d'hydrogène (on parle de molécule organique) alors elle est hydrophobe. Parmi les hydrophobes, on retrouve le cholestérol, la cire et l'huile.
Formule chimique du cholestérol. Le cholestérol est constitué d'un grand nombre d'atomes de carbone pour très peu d'oxygène: c'est une molécule hydrophobe.
- Si elle contient peu d'atomes de carbone mais des atomes comme l'oxygène ou le chlore, alors la molécule est hydrophile. Une molécule qui porte une charge électrique est elle aussi hydrophile. Par exemple, le méthanol, l'éthanol, les ions métalliques (Cu2+, Fe2+...) ou le sel (Na+, Cl-) sont tout à fait hydrophiles.
La formule chimique de l'éthanol, l'alcool présent dans les boissons alcoolisées.
Bien sûr il existe des nuances, par exemple une molécule organique avec des atomes d'oxygène ou de chlore sont un peu plus hydrophiles.
Par exemple, les PCB (biphényls polychlorés) sont des molécules riches en atomes de carbone, donc principalement hydrophobes, mais elles présentent un certain nombre d'atomes de chlore, ce qui les rend un peu plus hydrophiles.
Formule chimique de quelques PCB. Ils sont tellement nombreux que chaque nouvelle molécule identifiée est numérotée.

Le milieu aussi apporte une nuance: une molécule dissoute dans l'alcool ou un détergeant se mélangera plus facilement dans l'eau.

Combien de temps le milieu reste pollué ?
 Tout dépend de l'affinité de la molécule avec l'eau: une molécule très hydrophile sera éliminée quand l'eau du milieu sera renouvelée (ce qui est rapide dans une rivière mais bien plus long dans un lac ou un estuaire) alors qu'une molécule hydrophobe s'accroche (on dit qu'elle s'adsorbe) aux molécules organiques du sol, et reste donc beaucoup plus longtemps dans le milieu.

Alors, lequel est le plus toxique, hydrophile ou hydrophobe ?
C'est compliqué de répondre, la toxicité dépend de la molécule, de la dose, de la durée d'exposition.
Mais ce qui est sûr, c'est qu'une molécule hydrophile sera facilement absorbée par les organismes aquatiques puisqu'elle circule dans l'eau, alors qu'une molécule hydrophobe aura tendance à rester dans le sol. Dans ce cas ce sont les organismes du sol qui sont vulnérables.

Voilà pour cette première partie, j'espère qu'elle vous aura plu et que vous aurez appris quelque chose.
N'hésitez pas à laisser un commentaire, vos impressions ou vos conseils, je les lirai avec joie !

A la prochaine !


Sources

Sites Internet
Définition écotoxicologie
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89cotoxicologie
Définir les valeurs limites dans l'environnement de travail (ANSES)
https://www.anses.fr/fr/content/les-valeurs-limites-biologiques-pour-les-agents-chimiques-en-milieu-professionnel
Teneur du sol en métaux : rapport de l'INRA
http://www7.inra.fr/lecourrier/assets/C22Baize.pdf
Définition de compartiment écologique
https://www.dictionnaire-environnement.com/compartiment_environnemental_ID3571.html
Définition hydrophile
 https://www.futura-sciences.com/sciences/definitions/chimie-hydrophile-14644/
Définition hydrophobe
 https://www.futura-sciences.com/sciences/definitions/physique-hydrophobe-12597/

Images
Volcan en éruption
https://www.reunion.fr/sites/crt-reunion/files/styles/gallery_lightbox/public/content/images/volcan198_eruption_piton_de_la_fournaise_05_2015_-_credit_irt_-_luc_perrot_dts_06_2019.jpg?itok=wjAJl014
Eau rejetée après passage en station d'épuration
http://2.bp.blogspot.com/_NmSElZ5qEJA/TIuJTTUTxyI/AAAAAAAAAA8/ERlU4W_lajM/s1600/eau.jpg
Commode
http://www.sweetmango.fr/1881/commode-design-bois-multi-tiroirs.jpg
Formule chimique du cholestérol
https://rockland-inc.com/uploadedImages/ProductsStatic/Chemical-structure-of-cholesterol.jpg
Formule chimique de l'éthanol
http://4.bp.blogspot.com/-ywhTxfKgy9c/T_n6Sm8ug5I/AAAAAAAAABg/EJEUhC_QlTE/s1600/Ethanol-CRC-MW-trans-3D-balls.png

Articles scientifiques
M. Couderc, F. Gandolfi et al. "Levels and distributions of organic pollutants in subtidal sediments from the Loire estuary: are there any relationships with TTR-binding activity ?" Journal of Sea Research (2016)

mercredi 23 octobre 2019

L'écotoxicologie, sommaire

Fichus arbres, j'ai encore des feuilles plein les cheveux !
Ah, vous voilà.
Jusqu'ici, j'ai traité de sujets insolites ou simplement intéressants comme la taille des arbres, les nanoparticules, les herbes roulantes du désert ou même la recette du bonheur.
Aujourd'hui, j'aimerais vous parler de la discipline que j'ai étudié en cours, l'écotoxicologie. Il y a beaucoup à dire, alors je développerai ce sujet sur cinq articles :

1. Quantité, nature et répartition du contaminant dans l'environnement

2. Effets d'une ou plusieurs contaminations sur un organisme modèle

3. Toxico-cinétique : que devient le contaminant dans l'organisme ?

4. Bioaccumulation: la chaîne alimentaire

5. Stress oxydant: comment, pourquoi, première extinction de masse

Tous ces articles sont en préparation, j'espère que vous apprécierez.
A bientôt !

jeudi 3 octobre 2019

La trogne ou "arbre têtard", technique ancestrale de rentabilisation des arbres

Une trogne ? C'est quoi une trogne ?
La trogne, c'est un arbre taillé d'une façon particulière.
C'est assez reconnaissable d'ailleurs : le tronc est large, boursouflé, parfois creux, les branches (quand il y en a) sont épaisses et noueuses, et au sommet on trouve des branches plus fines, très droites et verticales.
En gros, ça ressemble à ça :
Une trogne dans une haie. Le tronc large et les rameaux verticaux sont caractéristiques.


L'arbre est creux ? C'est normal ?
Oui, c'est tout à fait normal. Pendant la formation de la trogne, des mousses et des champignons rongent le sommet de l'arbre, qui se développe autour de cette blessure. Et comme on taille toujours au même endroit, les champignons mangent de plus en plus le bois, qui devient finalement creux. On trouve d'ailleurs un excellent engrais au fond des trognes qu'on appelle "le sang de la trogne". Tout un programme.

Et ça vient d'où en fait ?
Cette technique de taillage des arbres est très répandue en Europe, et elle est très ancienne puisqu'elle était très répandue au Moyen-Age.
D'ailleurs en France, il y aurait 250 noms pour la désigner !
On peut entendre le nom de "trogne" en Anjou, mais aussi "émousse" en Mayenne, "ragosse" en Bretagne...
Aujourd'hui, on peut trouver des trognes à la campagne dans les haies, les champs, les prairies...
Mais aussi en ville dans les cours d'école ou le bord des routes. Oui, je parle bien des platanes !

Des platanes en ville, au bord d'une route. Ils sont taillés en candélabres (une variante de la trogne) pour ne pas prendre trop de place

En quoi ça consiste une trogne, en fait ? Comment on passe d'un arbre ordinaire à cette apparence si... hem... particulière ? 
Alors c'est assez simple, mais pour cela on va avoir besoin de voir l'anatomie d'un arbre.


Pour faire une trogne, on a besoin d'un arbre (évidemment) qui a atteint la taille désirée, disons 2 mètres de haut. Pendant l'hiver, le houppier, c'est-à-dire la tête de l'arbre, qui comprend l'ensemble des branches, va être coupé à la base. On laisse uniquement le tronc.
Puis, régulièrement, toujours en hiver, on coupe de nouveau ce qui repousse. Il peut y avoir jusqu'à six ans entre deux tailles, pour que les branches soient assez épaisses..
Au bout de quelques dizaines d'années, on obtient une belle trogne !

Evidement, il y a plein de variations possibles sur le thème de la trogne, comme le "candélabre" : c'est une trogne à qui on a laissé quelques branches latérales. Il ne vous rappelle rien ?

Le saule cogneur (Harry Potter) a été taillé en candélabre. Un volontaire pour essayer ?

Est-ce qu'on peut faire une trogne à partir de n'importe quel arbre ?
On peut obtenir une trogne à partir d'un grand nombre d'essences d'arbres, en général des feuillus :
le platane, le saule, le chêne, le charme, le frêne...
Par contre, il est déconseillé d'essayer avec des arbres fruitiers à noyaux (abricotiers...), les épineux (sapins) ou le noyer.
Néanmoins, on peut faire une trogne avec des plantes qui ne sont pas des arbres, tant qu'elles produisent du bois, comme la vigne.

Une vigne taillée en candélabre

A quoi ça sert de mutiler un arbre comme ça ?
En fait, tailler un arbre de cette manière, à défaut d'être esthétique, présente plein d'avantages, à commencer par l'arbre: sa longévité augmente, comme la production de bois, et s'il est assez grand, il sera protégé contre les herbivores, qui ne pourront pas brouter les branches basses et blesser l'arbre.

Autre avantage, une trogne donne un coup de pouce à la biodiversité locale :
l'arbre sert de support pour de nombreuses plantes comme le lierre, le sureau noir, le fusain...
Il sert d'abri pour des animaux (oiseaux, grenouilles, insectes, petits mammifères...)

D'accord, mais l'Homme, à quoi ça lui sert ?
Le bois du tronc permet de fabriquer des meubles ou des poutres de charpente pour les maisons ou les bateaux.
Les rameaux, coupés régulièrement, servent de piquets, de manches d'outils, de bois de chauffage ou bien de fourrage s'ils sont coupés assez tôt.
Enfin, le "sang de la trogne" sert d'engrais pour les jeunes pousses, les légumes, les céréales.

Ah oui, c'est plutôt utile.
Et ce n'est pas fini !
Une trogne peut servir de repère sur une route: il peut indiquer le chemin vers une maison particulière par exemple.
Les tilleuls servaient parfois à abriter les pistes de danse de la pluie:

Un tilleul à danser en Belgique, à Macon, près d'une église.

Pendant la Première Guerre Mondiale, les trognes ont servi à cacher des armes, des hommes en fuite, et même de poste de guet ! Pour cette dernière utilité, on utilisait des fausses trognes, blindées et peintes pour ressembler à des arbres.
Qui irait soupçonner un arbre ?

Mon avis
J'ai toujours vu ces drôles d'arbres, ici et là, en me demandant quelle espèce de plante pouvait donner ce résultat à l'esthétique... discutable. Jusqu'ici, je n'avais jamais compris que ce que je voyais faisait partie du patrimoine culturel de mon pays, et que ça pouvait avoir une fonction.
C'est aussi ça la science, elle permet de répondre à des questions de la vie de tous les jours !

Cependant, maintenant que je comprends mieux la nature de cette forme d'arbres, je ne peux pas m'empêcher de comparer les trognes à des zombies sans tête, bossus et rongés par la mousse et les champignons.
Peut-être un peu trop d'anthropomorphisme de ma part ?

Néanmoins, ces arbres sont coupés régulièrement, encore et encore, pour produire toujours plus de bois. Pendant ce temps, les mousses, les champignons et les insectes les rongent de l'intérieur jusqu'à les creuser entièrement.
J'ai l'impression que c'est une chance pour eux de ne pas avoir de système nerveux.

Pour aller plus loin
Je vous laisse un lien vers la chaîne Avenir Permaculture qui parle de la taille des arbres, mais pas seulement :
https://www.youtube.com/channel/UC-9_Sm-wqs2SVpc_jIkHCrA


Sources
Pages Internet:
https://fr.wikipedia.org/wiki/Trogne_(arbre)#Patrimoine_naturel_et_culturel
https://jardinage.ooreka.fr/astuce/voir/309699/arbre-tetard

Images:
Tilleul à danser
http://www.tilleuls-a-danser.eu/images/illustrations/TaD_Macon.jpg

Trogne
http://www.ecobalade.fr/sites/default/files/styles/slideshow_detail_balade_full/public/PHOTO_balade/trogne-credit-pays-de-vendome_0.jpg?itok=tP63VqwB

Platanes au bord d'une route
https://static.actu.fr/uploads/2017/03/25438-170307130200317-01.jpg

Anatomie d'un arbre
http://encyclopedie_universelle.fracademic.com/pictures/encyclopedie_universelle/arbre.png

Saule cogneur
https://www.encyclopedie-hp.org/wp-content/uploads/sites/4/2016/02/willow.jpg

Vigne taillée
http://www.la-wine-ista.com/wp-content/uploads/2015/01/gobelet-apres.png

Documentaire ARTE sur la trogne :

dimanche 8 septembre 2019


Est-ce que vous connaissez les lézards anolis ?

J'ai regardé un documentaire sur ces petits lézards récemment (le lien vers le documentaire est en bas de l'article), et j'avais envie de partager mon étonnement.

Description du documentaire
Le documentaire est présenté par Neil Losin et Nathan "Neight" Dappen, biologistes et réalisateurs de documentaires, avec la participation de Jonathan Losos de l'Université d'Harvard, spécialiste incontesté des anolis.
Les lézards anolis sont une famille de lézards, qui regroupe environ 400 espèces, et qui vivent dans la Mer du Golfe, une zone qui comprend les Caraïbes et Miami.
Ils ressemblent aux petits lézards de nos jardins puisqu'ils ont la même taille, une forme similaire et une couleur ordinaire, à quelques petits détails près.
Première particularité, ces lézards ont des pattes comparables à celles des gecko, avec des petits poils sous les pattes (les cetae) qui leur permet de grimper sur les surfaces lisses comme les feuilles.
Une patte de gecko vue de dessous. Les cetae, les "empreintes digitales" du lézard, lui permettent de grimper aux surfaces lisses.
Autre particularité, ces petites créatures ont une membrane sous la gorge qu'ils peuvent déployer comme une crête pour séduire les femelles et défendre leur territoire contre les mâles envahissants.
Un lézard anolis vert posé sur une branche, avec sa crête de gorge déployée (en rose).
Leur régime alimentaire est assez simple, ces petits carnivores mangent tout ce qui entre dans leur bouche, à savoir des insectes, des araignées, des lézards et parfois d'autres anolis.

Pour la forme et la couleur, c'est un peu plus complexe : pour chaque espèce, la forme et la couleur est différente selon l'environnement :
- Sur les troncs d'arbres : couleur brune, longues pattes ;
- Dans l'herbe : rayures blanches et brunes, longue queue ;
- Dans les feuillages : couleur verte, pattes courtes ;
- Sur les branches fines : couleur brune, pattes courtes, queue courte.
Un mot a été inventé pour décrire cette variété liée à l'environnement : on parle d'écomorphe.

D'accord, mais où est la surprise ? L'émerveillement ? Doucement, j'y arrive.
Dans les petites îles des Caraïbes, on trouve une multitude d'espèces d'anolis, mais les lézards d'îles différentes ont toujours la même forme s'ils vivent au même endroit.
Soyons clairs, ce sont des espèces différentes qui ont une apparence similaire.

Les chercheurs ont pu déterminer que chaque caractéristique d'un écomorphe donne un avantage au lézard : des pattes plus longues permettent de courir plus vite ou sauter plus loin, des pattes courtes permettent d'agripper des brindilles facilement.
Ces animaux ont donc adopté des solutions similaires pour s'adapter aux mêmes conditions de vie, on parle donc de convergence évolutive.

La surprise arrive quand on s'intéresse à l'histoire évolutive de ces créatures. En effet, comment se fait-il que ces lézards soient aussi semblables alors qu'ils sont situés sur des îles différentes, sans aucun contact possible ?
Pour répondre à cette question, les chercheurs ont prélevé des échantillons d'ADN sur des lézards de chaque écomorphe sur un grand nombre d'iles de l'archipel. L'objectif était d'évaluer la distance génétique entre les différents groupes d'anolis pour construire ensuite un arbre phylogénétique qui montrerait les liens de parenté entre les groupes de lézards.

Un exemple d'arbre phylogénétique. On compare des caractères sur différentes espèces, et on les relie en fonction du nombre de points communs trouvés : plus il y a de points communs, plus les espèces sont proches dans l'arbre. D'ailleurs, suivant les caractères sélectionnés, l'Homme n'est pas forcément représenté en haut de l'arbre.
Les résultats indiquent quelque chose d'étonnant : les anolis ont d'abord colonisé les îles de l'archipel, avant d'évoluer et donner des espèces d'apparence similaire sur chaque île.
Ce qui est surprenant, c'est que vu la complexité de la nature et l'influence du hasard dans l'évolution, personne n'aurait pensé que plusieurs espèces évolueraient de la même façon, même pour répondre à des contraintes similaires.

Une autre question a été posée : les lézards sont-ils gênés par la présence humaine ? Comment s'en sortent-ils en milieu urbain ?
Pour y répondre, des lézards anolis ont été capturés à Miami et leurs caractéristiques ont été comparées à celles des lézards des forêts.
Ils ont découvert que les lézards des villes ont des cetae (leur surface adhérente sous les pattes) plus grandes, ce qui leur permet de s'accrocher à des surfaces très lisses, comme les lampadaires.
Ils sont aussi capables de supporter une chaleur de 1 °C plus importante. Ce n'est pas beaucoup, mais grâce à cette résistance, ils peuvent continuer à se nourrir, défendre leur territoire ou se reproduire là où d'autres seraient paralysés par la chaleur.

Mon avis
La première chose que j'ai remarqué dans ce documentaire, c'est que ces lézards ont une crête SOUS leur tête. Il paraît que ce n'est pas si extraordinaire. Vraiment ?
C'est un iguane. Et il a une crête. Sur la gorge.
Ensuite, je reste émerveillé par le fait que des espèces différentes deviennent physiquement proches lorsqu'elles sont soumises aux mêmes conditions : on peut citer le dingo, un marsupial (donc un proche parent du kangourou) qui ressemble énormément à un chien.
Des dingos jouent avec un chien.
L'évolution a doté les ptérodactyles, les oiseaux et les chauve-souris d'ailes dont la structure est proche, adaptée au vol battu. Ici, un schéma du squelette des ailes de ces animaux.

L'originalité ici c'est que la convergence ne vient pas d'une espèce qui devient une copie d'une autre espèce, mais d'une même espèce qui évolue de la même manière de façon indépendante.

Enfin, j'aime le fait qu'ils parlent de l'adaptation du lézard à la vie urbaine, de plus en plus d'espèces y sont confrontées et je ne suis pas sûr qu'elles s'adaptent toutes aussi bien que nos lézards anolis.

Conclusion
J'ai tendance à penser que "la nature a plus d'imagination que vous". Dans ce contexte, j'aimerais ajouter "dans la limite des stocks disponibles".

Pour aller plus loin
La pollution ne se limite pas à l'émission de CO2, elle peut être sonore, lumineuse, chimique... Voilà de quoi vous renseigner :
- Pollution sonore:
https://fr.wikipedia.org/wiki/Pollution_sonore
http://risquesenvironnementaux-collectivites.oree.org/le-guide/risques-mon-territoire/sante-environnement/pollution-sonore.html

- Pollution lumineuse :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Pollution_lumineuse
https://www.avex-asso.org/dossiers/wordpress/fr_FR/la-pollution-lumineuse-light-pollution/cartes-de-pollution-europeenne-avex-2016
http://risquesenvironnementaux-collectivites.oree.org/le-guide/risques-mon-territoire/sante-environnement/pollution-lumineuse.html



Sources
1. Vidéos YouTube
 Documentaire sur les anolis:



2. Sites Internet
Convergence évolutive
https://fr.wikipedia.org/wiki/Convergence_%C3%A9volutive
https://www.futura-sciences.com/sante/definitions/biologie-evolution-convergente-5897/

Définition d'écomorphe
http://dico-sciences-animales.cirad.fr/liste-mots.php?fiche=32317&def=%C3%A9comorphe

3. Images
Image de pattes de gecko
https://fr.cdn.v5.futura-sciences.com/builds/images/thumbs/9/9cc9b31738_546px-Tokay_foot-by-David_Clements.jpg?v5

Image d'anolis vert
http://www.anoleannals.org/wp-content/uploads/2013/06/DSC_0038-modified2.jpg

Arbre phylogénétique
https://static1.assistancescolaire.com/t/images/t_trde10ci01z.jpg

Image d'iguane
http://worldofreptile.com/wp-content/uploads/2017/01/iguane-vert.jpg

Image de dingo
http://australiangeographic.com.au/wp-content/uploads/2018/06/JE20160814652.jpg

Schéma du squelette d'ailes
https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/3/38/Homology.jpg/220px-Homology.jpg

samedi 18 mai 2019

Nanomatériaux




Pourquoi vouloir des particules aussi fines ?


https://www.annabac.com/annales-bac/de-la-couleur-des-nanoparticules-d-or

Quels matériaux sont utilisés pour fabriquer des nanomatériaux ?



D'accord, mais... A quoi ça sert ?
Voici quelques exemples d'utilisation des nanomatériaux :
 - De l'argile sur les vitres pour les rendre auto-nettoyantes
 - De l'argent dans le tissu des chaussettes pour tuer les bactéries responsables des mauvaises odeurs
 - De la silice pour rendre le blanc des vêtements plus éclatant
 - Dans la cosmétique, la crème solaire, les dentifrices...
 - Dans la médecine, pour traiter le cancer !


Qu'entends-je ? Des nanoparticules pour soigner des gens ?
Oui. Laurent Levy est docteur de l'Université Pierre et Marie Curie en Physique-Chimie spécialisé dans les nanomatériaux, et fondateur de Nanobiotix en 2003, une entreprise qui met au point des médicaments à base de nanomatériaux.
Dans la conférence qu'il a donné pour TEDx, il explique qu'il utilise ces nanoparticules pour augmenter l'efficacité de la chimio-thérapie.

Comment ça marche ?
Une suspension de particules est injectée dans la tumeur à détruire. Ces particules s'accumulent à l'intérieur des cellules cancéreuses, et quand l'exposition aux rayons X commence, ces particules accumulent l'énergie envoyée vers la tumeur. Les particules chauffent et tuent les cellules à éliminer.
Le traitement devient plus précis puisque les tissus sains autour de la tumeur ne sont pas affectés, le tissu malade est plus sensible au traitement donc les médecins peuvent décider de diminuer les doses de rayons.




Conférence TEDx de M. Laurent Levy sur les nanomatériaux


Ce n'est pas un peu risqué d'absorber des nanoparticules ? Elles sont faites de métaux ou de matériaux synthétiques, quand même!
Même si les nanotechnologies sont très récentes, les recherches tendent à montrer qu'absorber ces particules, par inhalation par exemple, ce n'est pas recommandé. Bien sûr, vu la diversité des nanoparticules, le degré de toxicité n'est pas le même suivant le matériau utilisé.


Même pour l'alimentation ?
Dans beaucoup de secteurs, les industriels semblent suivre le principe de précaution en prenant des mesures de sécurité qui évitent à leurs employés d'être trop exposés à ces poudres.
Mais en alimentaire, c'est plus compliqué : les nanoparticules sont utilisées pour la coloration, la conservation, etc. Le problème, c'est que ces particules ne sont pas vraiment indiquées sur l'étiquette du produit, ou indiquées sous des codes obscures (E5485, vous voyez ce que je veux dire).

Et l'environnement ?
Les nanoparticules sont appelées "polluants émergents" à cause de leur nouveauté. Les recherches sur le sujet tendent là aussi à montrer que les poissons et les bivalves n'apprécient pas d'avoir des nanoparticules dans leur système.

Dans tous les cas, la législation est en retard sur la régulation de ces particules, et vu la diversité des matériaux utilisés, ce sera long avant de cerner complètement le sujet.



C'est Pas Sorcier : les nanoparticules

Toutes les illustrations ont été produites par François Ruiz.

mercredi 9 janvier 2019

Le cholestérol

Le cholestérol, on en entend souvent parler, on nous dit par exemple qu'il bouche les artères, qu'il faut en manger moins et faire du sport pour rester en bonne santé.

Mais c'est quoi au juste, le cholestérol ? D'où vient-il ? Est-il seulement aussi mauvais qu'on nous le dit ?

Le cholestérol, c'est une molécule organique qu'on retrouve dans le corps de la plupart des animaux dits "supérieurs" donc les animaux pluricellulaires, mais pas les bactéries, les plantes, les levures, les champignons. Il est produit au niveau du foie, on le retrouve ensuite dans le reste de l'organisme.

Nous autres humains produisons donc du cholestérol par nous-même grâce à notre foie et nous en absorbons aussi par la nourriture : on en retrouve dans le poisson, la viande, les fruits de mer, les produits laitiers et tous les aliments qui contiennent un ingrédient d'origine animale. Sauf les ongles, les poils et la corne, évidemment.

Mais fichtre, me direz-vous, à quoi ça sert ?
Le cholestérol, contre toute attente, est utile à l'organisme : utilisé tel quel, il entre dans la composition des membranes des cellules du corps ; transformé, il devient une vitamine dans la peau, ou une hormone sexuelle comme la testostérone grâce aux gonades (testicules ou ovaires), mais aussi le fameux cortisol sous l'action des glandes surrénales. Bref, le cholestérol c'est comme un bloc de granite : on doute de son utilité jusqu'à ce qu'il soit révélé d'une manière ou d'une autre et devienne indispensable.
Formule chimique du cholestérol et de quelques dérivés

Et le mauvais cholestérol ?
Cette molécule n'est pas soluble dans le sang, elle doit donc trouver un transporteur pour se rendre jusqu'aux organes du corps sans transformer le sang en vinaigrette.

Les transporteurs dédiés aux lipides sont appelés lipoprotéines. Celles qui prennent en charge le cholestérol sont appelées HDL (pour High Density Lipoproteins) et LDL (pour Low Density Lipoproteins). Les LDL transportent le cholestérol vers les organes et les HDL le rapportent au foie après utilisation pour être dégradé et relâché dans le tube digestif.

Le mauvais cholestérol, ce sont les LDL : en trop grande quantité, elles peuvent se déposer sur la paroi des vaisseaux sanguins et former ce qu'on appelle une plaque d'athérome, qui bouche petit à petit ces vaisseaux. Vous connaissez la suite : le risque d'AVC ou d'infarctus augmente selon l'endroit du vaisseau obstrué.
Schéma de la circulation du cholestérol dans l'organisme. Les proportions indiquent d'où vient le cholestérol retrouvé dans le corps. Ces proportions sont à vérifier.

Alors, le cholestérol, monstre ou bienfaiteur incompris ?
On a vu que le cholestérol était utile à l'organisme puisqu'il permet de produire beaucoup de molécules intéressantes pour le corps. Par contre, un excès de cholestérol dans l'alimentation augmente le risque de maladies cardio-vasculaires.

Alors l'un dans l'autre, avoir une alimentation variée et équilibrée me semble être la meilleure solution pour apporter ce dont le corps a besoin sans risquer de problèmes.

Avez-vous aimé ce nouvel article ? N'hésitez pas à le dire dans les commentaires et à me proposer des conseils. Je vous invite à corriger mes éventuelles erreurs et à vérifier les informations de cet article par vous-même.